S2 #9 Bienvenue en incertitude, le livre pour survivre et prospérer dans un monde de surprises

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Les décideurs s’obstinent à prévoir l’inconnu. Dans son dernier livre, Philippe Silberzahn explique pourquoi les résultats ne sont pas au rendez-vous. Face à l’incertitude, il propose d’en tirer parti : survivre et même à prospérer dans un monde de surprises.  

Le livre pour survivre et prospérer face à l’incertitude, pourquoi ce choix ?

Bienvenue en incertitude est le dernier ouvrage de Philippe Silberzahn. Ce chercheur, spécialiste des organisations, consultant et conférencier est aussi professeur à l’emLyon business school. Il est aussi l’auteur de nombreux livres.

Alors, question rituelle pour démarrer cet épisode. Pourquoi ce choix ?

Dans un monde complexe, prédire n’est plus possible. Ce livre est d’abord un constat bien argumenté. Mais, pas seulement. L’auteur n’en reste pas là.   

Il invite à créer l’avenir, à tirer parti de l’incertitude. Elle est source d’opportunités, l’action humaine est, alors, créatrice.

On retrouve aussi une attitude active alors que ce constat nous amenait plutôt à rester passif. Une posture qui n’est pas sans rappeler celle des entrepreneurs.

Comment définir l’incertitude ?

Qu’est ce que l’incertitude ? C’est l’absence d’informations objectives sur un environnement donné.  

Elle est présente dans tous les systèmes sociaux, ceux qui sont constitués d’humains réfléchissant. On pense ici à des organisations, des marchés.

Ces systèmes ne sont pas prédictibles. Pourquoi ? Des faits apparaissent tous les jours, la nouveauté est permanente.

En plus, ces systèmes sont complexes.

Leurs paramètres sont nombreux. C’est difficile de les connaitre tous tout comme le résultat de leurs interactions.

Les anticipations des acteurs influencent aussi ces systèmes. Cela amène encore une dose de complexité supplémentaire.  

Ces systèmes présentent une seconde caractéristique. 

Leur évolution n’est pas linéaire. Elle est lente, longue, un changement brusque, fort peut se produire, souvent, par surprise. Le système complexe est volatil.

Tout cela crée de l’incertitude, les événements qui peuvent se produire sont hétérogènes et ils ne sont ni classables, ni catégorisables. Nous sommes dans le domaine de l’inédit, dit l’auteur.

Vous allez me dire que l’incertitude a toujours existé ? Oui, et elle est plus forte aujourd’hui qu’hier.

Pour décider, il faut tenir compte d’un nombre plus important de paramètres.

Survivre et prospérer en incertitude, c’est la fin de la prédiction.

Quand on doit prendre les meilleures décisions, la vieille recette reste prédire.  Pourtant, nous sommes incapables de le faire.

Cela n’est pas dû à une insuffisance de notre part, ni à un manque de moyens techniques nous dit l’auteur.

Il le démontre théories et exemples à l’appui. Philippe Silberzahn revient notamment sur la toute puissance des chiffres. La technologie et les big datas en particulier n’améliorent pas les prédictions.

L’incapacité de prédire est inhérente au système.

Décider en se basant sur la prédiction rend fragile.  Tant que les prédictions fonctionnent, tout va bien. Quand l’inédit arrive, les conséquences en terme d’impact individuel, collectif, national sont importantes et couteuses.

En conclusion, acquérir plus de connaissances, même grâce à la technologie ne vous met pas en positions de force pour anticiper les évolutions et donc prendre de bonnes décisions.

S'intéresser au jeu des acteurs en présence

A cette première approche, se rajoute un second élément : le jeu des acteurs en présence.

La prédiction, l’anticipation et la décision sont réalisés par des êtres humains. Donc, il est bien difficile de séparer les faits de celui qui les choisit et les analyse.  

Le contexte social, institutionnel est important et encore plus dans un contexte d’incertitude.

En effet, le décideur, vous et moi donnons un sens au monde à partir d’hypothèses, de croyances. L’auteur les appelle les modèles mentaux, ils sont le reflet de votre identité, de celle de votre organisation.

La vision de votre environnement dépend fortement de votre identité sociale et professionnelle. Décider renvoie, alors, à la question de l’autre, et aussi à votre capacité à le comprendre sans le juger.

L’auteur revient aussi sur le processus de décision au sein d’une organisation.  Il appelle cela les différentes étapes du cycle de renseignement.

Il démarre par l’expression du besoin, le recueil d’information, l’analyse, la production et la dissémination. L’erreur d’anticipation prend sa source dans chaque étape.

J’insiste ici sur un seul élément, vous en lirez d’autres dans l’ouvrage. Il s’agit des relations entre le décideur et le conseilleur.

Dans le modèle cartésien, la réflexion et l’action sont séparées, le rôle de l’analyste et celui du décideur aussi.

La nature changeante de l’environnement vous invite à revoir cette distinction. Philippe Silberzahn suggère de remplacer la relation classique client-fournisseur par une conversation stratégique.  

En effet, la survenance de certains événements inédit doit, alors, être vendue au décideur, ceux-ci rentrant en concurrence avec des hypothèses, des croyances existantes, un agenda précis.

Survivre et prospérer en incertitude, une nouvelle définition de l’action

L’auteur vous invite à remettre en cause le modèle de Descartes.

Pour bien décider, il suffirait d’avoir une bonne information. On pourrait alors choisir quoi faire, comment bien faire nous dit l’auteur.  Il y a d’abord la connaissance et puis, l’action.

Dans le modèle classique, la décision suit le processus suivant. Une situation est analysée, un objectif fixé, les options possibles déterminées et un choix optimal est fait.

C’est ensuite le passage à l’action, la mise en œuvre du plan qui permet d’atteindre l’objectif. C’est une conception prudentielle de l’action.

Machiavel propose une approche opposée : agir car on ne sait pas !

L’action permet de dévoiler des options que vous ne pouviez pas connaitre. Vous découvrez des « partis demeurés cachés », cela permet d’ouvrir des possibilités inimaginables si vous n’aviez pas agi prévient l’auteur.

Et ce n’est pas fini ! L’action crée aussi des situations, elle ne fait pas que les dévoiler.

Plus que l’action révélatrice, c’est l’action créatrice. Cette approche a été mise en avant par le courant philosophique du pragmatisme.

Accueillons l’incertitude comme Montaigne aimait le faire. C’était une fête, un domaine des possibles.

L’incertitude, c’est aussi la matière première des entrepreneurs nous dit l’auteur.

Ils vont même s’organiser pour en tirer parti. Plutôt que des futurs à éviter, l’auteur parle d’avenir à créer.

Quatre postures différentes pour décider en situation d’incertitude.

Face à l’avenir, vous avez le choix entre quatre postures différentes.

L’auteur combine deux éléments :  

Il y a d’abord la prédiction.

Vous pouvez estimer que vous pouvez prédire l’avenir, l’évolution de votre environnement ou au contraire, vous pensez ne pas être en mesure de le faire, l’environnement étant incertain.

Il y a ensuite le contrôle.

Vous estimez que vous pouvez influencer votre environnement ou au contraire, vous ne le pensez pas possible.

Quatre postures se dégagent.

Voici les deux premières :

La première combine prédiction élevée et faible degré de contrôle.

Vous êtes preneur du monde. Les évolutions, vous les anticipez, mais, ne savez pas les influencer. Alors, vous vous organisez pour profiter de ces évolutions anticipées. Vive le plan et plus particulièrement sur les marchés avec une certaine stabilité si cela existe encore !

La seconde combine prédiction et degré de contrôle élevé.

Vous êtes un visionnaire. Vous réalisez la prédiction. Un exemple : Elon Musk. Si sa réussite vous intrigue, écoutez l’épisode du Sirop consacré à sa biographie !

Il reste deux autres postures.

La troisième combine prédiction et degré de contrôle faible. Vous êtes preneur du monde événements après événements. Quand ils se produisent, vous réagissez, vous vous adaptez, le champion de la flexibilité.

Enfin, il reste une dernière posture, la combination prédiction et contrôle faible. Vous ne savez pas anticiper, ni influencer.

Eh, bien, nous sommes ici dans le paradigme de la transformation, de l’innovation, de l’entrepreneuriat.

Cette posture est intéressante surtout en situation d’incertitude. Que nous raconte-t-elle ? Pas besoin de vision finale pour avancer, pour agir. C’est une série de transformation à court terme qui vont changer le monde.

Survivre et prospérer en incertitude, comment faire ?

Face à l’incertitude, l’auteur propose donc deux pistes d’action.

La première est une invitation à survivre dans cet environnement incertain. On parle de futurs à éviter.

L’auteur donne quelques pistes pour améliorer, à la marge, les prédictions et donc en minimiser les conséquences lorsqu’elles sont erronées.

J’ai choisi de m’attarder sur l’autre posture. L’auteur parle de prospérité face à l’incertitude, d’avenir à créer.

C’est apprendre à penser et agir comme un entrepreneur. Il s’agit d’avoir une relation différente avec votre environnement, le transformer, faire avec les parties prenantes.

L’incertitude ne se règle pas avec des techniques, un meilleur accès à l’information, ni par des qualités personnelles.  L’entrepreneur crée le futur, codétermine son avenir par ses décisions nous dit l’auteur.

Il ne choisit pas parmi différentes options, il crée celle qu’il souhaite. C’est la fin du modèle de rationalité causale.

On a un objectif, on cherche les meilleurs moyens. On optime, on analyse au préalable et bonjour les prédictions pour éviter les mauvaises surprises.

Pour l’entrepreneur, c’est différent. Philippe Silberzahn parle d’effectuation. Le point de départ n’est plus les objectifs à atteindre, mais, les ressources disponibles.

Les moyens sont donnés, les objectifs en découlent.  Bienvenue en incertitude ! Fini l’optimisation, bonjour à la création. Dans un cas, on choisit parmi plusieurs options. Dans l’autre, on définit de nouvelles possibilités à partir des ressources existantes.

Cinq principes d’action dans un monde d'incertitude

Face à l’incertitude, le décideur a deux options. La première est d’éviter le futur, la seconde est de tirer parti de l’incertitude, de transformer l’environnement à son avantage.

Alors, concrètement, quelles postures pertinentes pour un décideur ?

L’ouvrage se termine en proposant cinq principes d’action.  J’en ai sélectionné trois. Je vous les résume rapidement, une façon de vous donner envie de découvrir les deux autres.

Choisir la conversation plutôt que la formalisation, celui-ci fige la problématique à un instant donné.  

Vous allez apprendre à poster des questions à l’ensemble des parties prenantes. Fini la séparation entre pensée et action, retour du contexte !

L’auteur invite aussi à créer des Cassandres dans les organisations, des mécanismes qui permettent aux opinions divergentes de s’exprimer.

Deuxième idée : l’identité plutôt que les données.

Vous avez une approche subjective de la réalité. Je vous ai parlé au début de cet épisode de l’importance de l’identité, de vos croyances, des modèles mentaux.

Le point de départ nous dit l’auteur est le sujet agissant plutôt que le sujet pensant. On met le focus sur sur l’être et ses ressources disponibles.

Les questions sont alors : qui êtes-vous, ce que vous connaissez, qui vous connaissez. Et surtout, que pouvez-vous faire avec cela, que souhaitez-vous faire avec cela ?

Enfin, troisième principe d’action : préférer le contrôle plutôt que la prédiction

L’auteur propose d’envisager les actions en identifiant un niveau de pertes acceptables.

La prudence se combine à l’action, on agit en sachant ce qu’on risque de perdre, on est aussi conscient qu’on a beaucoup à gagner même avec peu d’informations !

L’ouvrage met en avant l’importance de l’action qui dévoile, qui révèle, qui crée. Elle donne au décideur une dimension de contrôle, il pilote l’avion, peut le contrôler, influencer son évolution et le transformer.

Décider dans un contexte d’incertitude, d’autres épisodes à écouter.

Je vous propose d’écouter deux épisodes du Sirop qui apportent un éclairage complémentaire.

La biographie d’Elon Musk vous invite à comprendre la réussite de ce visionnaire.

Enfin, le livre d’Olivier Sibony, vous allez commettre de terribles erreurs,  explique comment prendre de meilleurs décisions en identifiant vos biais cognitifs.

Si cet épisode vous a intéressé, partagez le avec vos copains entrepreneurs ou dirigeants. Vous permettez ainsi à de futurs auditeurs de découvrir le Sirop.

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Rendez-vous dans 15 jours pour un nouvel épisode du Sirop !

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